Mis à jour le 06/11/2024
Il y a quelque temps, nous avons fait la connaissance de Nicole Kultau, auteur d’un blog où elle parle de sa vie quotidienne et de sa façon d’affronter le cancer. Durant notre discussion, Nicole nous a expliqué ce que les patients attendent de leur entourage.
Vous avez subi un choc à l’annonce de votre cancer et vous n’avez pas eu un parcours toujours facile par la suite. Avez-vous vécu des expériences positives durant cette période et si oui, lesquelles ?
Mes plus belles expériences durant ma maladie peuvent paraître dérisoires, mais ces instants ont revêtu une grande importance pour moi. Je veux parler notamment du soutien dont a fait preuve l’équipe enseignante de mon fils à l’école. Une association en Allemagne (Lebenshilfe) a été sollicitée pour s’occuper de lui après l’école. Je savais donc qu’il était entre de bonnes mains quand je ne pouvais pas m’occuper de lui. Mes amis se sont aussi rapprochés de moi pendant cette période et leur seule présence m’a donné beaucoup de courage et de force. L’un d’entre eux m’a même aidé financièrement. Je n’aurais jamais cru me retrouver dans une telle situation, mais c’est le cas d’un grand nombre de patients atteints d’un cancer. Aujourd’hui, je leur suis extrêmement reconnaissante pour leur aide.
Mes amis et ma famille me connaissaient avant la maladie et ont accepté la Nicole que je suis devenue : chauve et terrorisée, mais débordante de joie de vivre.
Qu’est-ce qui vous a le plus aidée ?
Pour me renseigner sur le diagnostic, j’ai d’abord lu dans mon coin des discussions sur les forums en ligne, mais je ne me reconnaissais pas là-dedans. Je suis donc ravie que mes médecins m’aient si bien épaulée tout au long du traitement. Mon radiologue et mon gynécologue, notamment. Ils se sont occupés de choses que je ne savais pas comment gérer. Même mon dentiste a pris le temps de me recommander quelques lectures qui m’ont donné de la force. Il m’est aussi arrivé d’entendre parfois des inconnus me dire simplement « Tous mes vœux de rétablissement » en voyant que je portais un foulard sur la tête.
Les personnes avec lesquelles j’ai pu rire et pleurer sont celles qui m’ont le plus aidée.
Qu’est-ce qui vous a été le plus bénéfique ?
D’avoir des amis qui m’appellent simplement pour savoir s’ils peuvent faire quelque chose pour moi, comme s’occuper de mon fils quelques heures ou faire la cuisine. Mais certains ont aussi préparé mes valises, m’ont conduite à l’hôpital et ont assisté à mes consultations. Ces « dons de temps » sont très précieux. C’est vraiment important d’avoir un petit cercle amical et familial sur lequel on peut compter pour faire le ménage si nécessaire dans votre appartement, entretenir le jardin ou faire des courses à votre place, par exemple. Les patients atteints d’un cancer sont dépendants de leur entourage. Bon nombre d’amis et de membres de ma famille ont fait exactement ce qu’il fallait faire et se sont avérés d’incroyables alliés.
Comment faisiez-vous connaître vos besoins à votre entourage ?
Au début, je n’arrivais pas à faire le tri dans mes sentiments et mes besoins. Mon fils était ma principale préoccupation, donc j’ai dit à mes amis que j’avais besoin d’aide par rapport à lui. Savoir que je pouvais les appeler à tout moment m’a beaucoup facilité les choses. Pourtant, je n’avais pas toujours le courage de faire appel à eux. Je ne parvenais pas à expliquer le soutien dont j’avais besoin. Dans ce cas, votre entourage doit se montrer proactif et demander : « Qu’est-ce que je peux faire pour que tu te sentes mieux ? ».
Avez-vous vécu des expériences négatives ?
Certaines personnes autour de moi avaient des attentes déloyales à mon égard, des attentes qu’il m’était impossible de satisfaire. À l’issue du traitement contre le cancer, l’entourage s’attend à ce que la personne redevienne « normale » et se comporte comme avant. Or, ce n’est pas possible. Après cette épreuve, les patients sont traumatisés. Ils subissent encore les conséquences à long terme et les effets secondaires de plusieurs médicaments ou traitements. J’avançais à tâtons et pourtant, certains m’opposaient des exigences que je devais satisfaire immédiatement. J’ai dû apprendre à me séparer de ces personnes.
Quelles phrases et attitudes vous ont blessée ?
« Tu as l’air bien portante, donc ça ne doit pas aller si mal » : c’est une phrase que j’ai entendue très souvent. Pourtant, de l’extérieur, on ne peut jamais savoir ce que les gens ressentent vraiment. Certaines personnes autour de moi ont également évoqué le fait que j’allais bientôt mourir. Cela m’a profondément blessée. Pendant les séances de radiothérapie, certains m’ont dit que je pouvais désormais chercher du travail afin d’améliorer ma situation financière. Personne ne m’a demandé comment je vivais ce traitement et ses conséquences. Comme je l’ai dit récemment lors d’une de mes conférences (et je ne le répèterai jamais assez), il est parfois nécessaire dans le couple de laisser la personne malade tranquille et de privilégier le silence. Cela lui permet de s’éclaircir les idées pour envisager la suite.
Quelles étaient vos plus grandes préoccupations ?
De me retrouver seule ! Je ne souhaite un tel abandon à aucun patient souffrant d’un cancer. La vie continue pour les amis et la famille. Or, la maladie apporte toujours son lot de problèmes à gérer pour les patients. Il n’est pas nécessaire d’avoir beaucoup d’amis, mais si vous avez dans votre entourage une personne qui est toujours à vos côtés dans les situations difficiles, cela vaut tout l’or du monde et fait s’envoler une bonne partie de vos inquiétudes.
Quelles activités entre amis vous ont aidée au fil du temps ?
Avoir une bonne conversation m’a beaucoup aidée. Je savais que ces personnes m’écoutaient, qu’elles étaient à mes côtés et que je pouvais toujours compter sur elles. J’ai aussi apprécié les petites attentions : une carte postale, un SMS ou un livre intéressant. Un chèque-cadeau est une très bonne idée quand vous ne savez pas comment apporter votre soutien. Cela permet de regrouper diverses possibilités. Le patient choisit ensuite ce dont il a besoin sur le moment. Ce n’est pas toujours facile de formuler ses souhaits. Le chèque-cadeau permet d’écarter cet obstacle.
Que devraient savoir toutes les personnes dans l’entourage d’un patient atteint d’un cancer ?
Le cancer place chaque patient dans une situation exceptionnelle. C’est cette personne, avec ses qualités et ses aptitudes, qui doit retenir toute l’attention, et non la maladie. Elle n’a rien perdu de ses envies et de son savoir-faire. Elle peut encore jouer son rôle d’amie et participer à la vie de famille. Elle reste la même personne qu’avant le diagnostic, même si elle ne peut plus faire tout ce qu’on attend d’elle. Nous ne voulons pas être exclus, nous voulons faire partie intégrante de notre entourage et rester en contact avec notre famille, nos amis et nos collègues. Et par-dessus tout, nous ne voulons pas tomber dans l’oubli et être marginalisés.
Maintenir le dialogue ouvert nous aide à surmonter notre timidité et à accepter de l’aide. La meilleure chose à faire reste de toujours demander l’avis de la personne concernée.
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