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L’art thérapie : soulager les maux du cancer

L’art thérapie repose sur l’idée que les arts créatifs peuvent avoir un effet thérapeutique. Elle peut permettre aux personnes atteintes d’un cancer d’exprimer des inquiétudes non verbalisées ou inconscientes relatives à leur maladie et à leur vie, de faire face à des conflits émotionnels, d’accroître leur connaissance de soi, de lutter contre leur cancer, de soulager la douleur et de réduire le stress. Pourquoi ? Comment ? C’est ce que nous vous proposons de découvrir en détails dans cet article.

L’art-thérapie, aussi appelée thérapie par les arts créatifs ou thérapie par les arts expressifs, est une discipline scientifique paramédicale originale, pratiquée sur tous les continents, qui consiste à utiliser l’art à des fins thérapeutiques. Préconisée par La Ligue contre le cancer, elle contribue à faire face aux traitements sur la durée et aux problématiques liées à la maladie, telles que la douleur physique et psychique, parce que bien souvent les mots manquent ou ne suffisent plus pour traduire des vécus douloureux. Elle met à disposition un espace intermédiaire, sécurisant, pour créer des conditions favorables au dépassement des difficultés liées au cancer, en partenariat avec l’ensemble de l’équipe de soin, tout au long du parcours de soins du patient :

  • du dispositif d’annonce à travers lequel une première évaluation des besoins peut être réalisée ;
  • aux différentes phases de la maladie – curative, palliative ou terminale -, le temps de l’hospitalisation et des traitements ;
  • et après les traitements, en période de rémission, pour accompagner le temps du retour à la santé.

« … envisager la créativité dans son acception la plus large, sans l’enfermer dans les limites d’une création réussie ou reconnue, mais bien plutôt en la considérant comme la coloration de toute attitude face à la réalité extérieure » Winnicott (1971, Jeu et Réalité)

Les origines de l’art thérapie

L’application de l’art à des fins thérapeutiques n’est pas un concept nouveau. Dès l’Antiquité, l’art est utilisé pour soigner. Son concept en tant que thérapie pourrait être attribué à Aristote, selon qui, la représentation théâtrale permettrait aux hommes d’entrer dans un processus de catharsis, c’est-à-dire de se décharger de leurs pulsions, angoisses ou fantasmes en s’identifiant aux personnages du drame. Au début du XXe siècle, le psychiatre suisse Carl G. Jung (1875-1961) avait déjà lui-même expérimenté les bienfaits de l’expression par le dessin. Il a ensuite intégré cette approche dans sa pratique.

Toutefois, l’art thérapie n’a fait son entrée officielle dans la société contemporaine que vers les années 1930, avec la naissance des centres d’ergothérapie (réhabilitation par l’apprentissage) et de thérapeutique occupationnelle. En 1954, le premier département d’art psychopathologique est ouvert sous l’impulsion de Robert Volmat à la clinique des maladies mentales et de l’encéphale à Paris. Cette forme d’art thérapie est celle que l’on qualifie aujourd’hui de traditionnelle, ou psychothérapie par l’art. Il s’agit d’une méthode de travail en psychothérapie utilisant l’ensemble des outils d’expression artistique dans le but de renouer le dialogue avec soi-même et avec autrui, et de stimuler la créativité de chacun. Par l’art, le patient laisse surgir ses émotions, ses souffrances, pour se découvrir et évoluer vers un mieux-être, une résolution ou une meilleure utilisation de ses ressources.

L’art thérapie dite moderne, pratiquée sous l’autorité médicale, s’est développée en France dans les années 1970 à l’initiative du centre de recherches de l’Association française de recherche et application des techniques artistiques en pédagogie et médecine (Afratapem). En 1980, est créé le premier diplôme universitaire français à la faculté de médecine de Tours. Cette discipline exploite le pouvoir propre de l’art sans aucune interprétation de l’intention, de l’action ou de la production artistique. Elle n’est donc pas une psychothérapie. Elle a vocation à favoriser les capacités expressives et relationnelles des patients. Un protocole thérapeutique est établi, des stratégies thérapeutiques ainsi que des évaluations pour valider les progrès sont mises en place et réalisées par les professionnels. Elle représente aujourd’hui l’essentiel de la pratique de cette discipline.

Libérer son émotion, la comprendre, la transformer

Quelque soit l’activité créative choisie, parmi les nombreuses possibilités,

peinture, dessin, sculpture, modelage, collage, photographie, écriture, marionnettes, vidéo, danse, théâtre, musique, chant, clown, masque, poésie, lecture, cirque, cinéma etc.,

l’objectif est de permettre au patient de s’impliquer, de choisir et de se mobiliser physiquement et psychiquement, à travers sa production artistique et l’élan mis en place à cette occasion. Elle utilise la création artistique pour lui permettre de prendre contact avec sa vie intérieure (sentiments, rêves, inconscient, etc.), l’exprimer et se transformer. C’est un espace qui lui est mis à disposition pour élaborer, symboliser, représenter. L’activité consiste à stimuler ce qui fonctionne bien :

  • gratifier les sens ;
  • se projeter, retrouver un sens à sa vie, une qualité existentielle ;
  • valoriser la personne ;
  • laisser venir l’inattendu et l’inexploré ;
  • bouleverser de façon positive le quotidien ;
  • stimuler le goût, le plaisir, les capacités techniques ;
  • retrouver une juste estime de soi en s’impliquant dans la pratique artistique.

À qui s’adresse l’art thérapie ?

L’art thérapie n’a pas pour but de former des artistes. Elle a comme principales indications les troubles de l’expression, de la relation et de la communication. Aucune compétence artistique préalable, ni aucun talent, ne sont requis. Elle s’adresse aux patients dès le plus jeune âge :

  • douloureux ;
  • manifestant une anxiété, un mal-être ;
  • un bouleversement massif des repères internes ;
  • une incapacité à agir ou à exprimer angoisses et souffrances ;
  • subissant de longues hospitalisations ;
  • en renforcement du lien parents/enfants ;
  • face à des troubles psychoaffectifs, sensoriels, comportementaux, physiques, neurologiques…

En offrant une parenthèse, un moment d’oubli de la maladie, elle permet de :

  • mieux s’intégrer au projet de soin ;
  • favoriser la communication avec l’entourage, l’équipe soignante etc. ;
  • détourner l’attention de l’angoisse, de la douleur ;
  • se ressourcer, se recentrer ;
  • capter l’esprit, le mettre au repos du stress généré par la maladie et les traitements ;
  • revaloriser l’image, la confiance et l’estime de soi ;
  • se sentir investi dans un projet et le vivre au quotidien ;
  • se sentir ancré et stimuler son imaginaire ;
  • faire des choix, décider et maîtriser quelque chose ;
  • laisser une trace, des productions testamentaires ;
  • exprimer son affect ;
  • faire pour quelqu’un ;
  • stimuler la motricité ;
  • offrir un mode de communication non verbale, un temps d’apaisement ;
  • offrir un domaine où il y a une chance de progression et d’élaboration positive.

« Le but est de partir, dans le cadre d’un processus créatif, de ses douleurs, de ses violences, de ses contradictions pour en faire le matériau d’un cheminement personnel. Du pire naît ainsi une construction, une production qui tend vers l’art. » Dr Jean-Pierre Klein, psychiatre et directeur de l’Institut national d’expression, de création, d’art et de thérapie (Inecat) de Paris.

Quels sont les bienfaits de l’art thérapie pour les personnes atteintes d’un cancer ?

Les personnes atteintes d’un cancer ainsi que leur conjoint et les membres de la famille ont recours à l’art thérapie pour les aider à faire face à leurs émotions. Le pouvoir de l’art thérapie réside dans le fait qu’il s’agit d’un moyen d’expression différent permettant aux patients de se livrer autrement que par les mots. Un aspect d’autant plus important qu’il arrive que certains patients aient du mal à parler, à trouver les mots ou à entrer en relation avec les autres.

L’art thérapie permet de chatouiller le merveilleux qu’il y a en chacun de nous, de proposer un parcours symbolique parallèle au parcours de soin, de chercher du sens en créant, de gratifier les sens et de se faire du bien en créant quelque chose de beau.

Cet accompagnement, qui fait participer tout l’être, permet aux patients atteints d’un cancer et/ou en soins palliatifs de :

  • diminuer l’anxiété et le stress ;
  • faire face à la fatigue et à la dépression ;
  • soulager la douleur pendant et après les séances, voire pendant les soins ;
  • diminuer les symptômes en général, notamment une normalisation de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle et de la sécrétion de cortisol ;
  • s’apaiser, se détendre, s’évader ;
  • gagner en vitalité et mieux-être ;
  • rompre avec l’isolement ;
  • avoir des effets positifs sur la capacité à affronter la maladie et sur l’interaction sociale ;
  • améliorer la qualité de vie.

Des effets positifs de l’art thérapie, comme une baisse de l’anxiété et du stress, ont également été constatés auprès des aidants familiaux.

Comment s’y retrouver parmi les différents types d’activités proposées dans le cadre de l’art thérapie ?

« L’art thérapie ne doit se mouvoir ni dans la trop grande facilité, ni dans l’expression taboue » Dr Jean-Pierre Klein.

L’art thérapie regroupe toutes les disciplines artistiques. Il s’agit pour le patient de choisir celle qui lui permettra de mieux explorer ses émotions. En voici quelques exemples :

  • Le coloriage : longtemps réservés aux enfants, les livres de coloriage pour adultes ont fait leur apparition il y a quelques années. Ce succès peut s’expliquer par le fait que le coloriage est abordable et facile d’accès, et qu’il ne nécessite pas de compétences techniques particulières. De nombreux indices sur la vie interne de l’individu peuvent émerger à la suite du coloriage : les couleurs utilisées, le type de trait etc. C’est une activité qui favorise la concentration et qui permet de lâcher prise et de ne plus penser à rien. C’est en cela qu’il est profondément anti-stressant. Certains spécialistes estiment même que les effets du coloriage pourraient être similaires à ceux de la méditation.
  • Le théâtre : les exercices sont très variés. Par exemple, l’utilisation de marionnettes peut permettre au patient de se projeter et de communiquer de façon indirecte sur lui-même. D’autres exercices peuvent consister à rencontrer son « soi intérieur », à mettre en scène un souvenir, à raconter son propre conte… Le théâtre remplit une fonction d’exutoire tout autant que de dédramatisation. Que ce soit pour mieux se connaître, ou pour décharger ses émotions, il peut constituer une excellente thérapie.
  • La musique : aussi appelée musicothérapie, la thérapie par la musique est un moyen privilégié d’accéder à ses émotions et de les décharger. Elle consiste en un travail sur les vibrations et sur le corps à travers le rythme. On parle de musicothérapie réceptive lorsque l’individu écoute de la musique et de musicothérapie active lorsque l’individu crée un extrait musical à l’aide d’un instrument. La musique, dotée d’un exceptionnel pouvoir de mobilisation émotionnelle, encourage une réappropriation progressive de son corps, ouvre les voies de la communication et développe la créativité.
  • La danse : la danse-thérapie permet au patient de faire sortir ses émotions et de s’exprimer à travers son corps. Elle symbolise ses contradictions et renforce l’unité psychocorporelle. Ici, il n’y a pas d’apprentissage mais de l’expression pure. Certains exercices peuvent consister à exprimer sa colère (la danse du guerrier) ou sa sensualité (la danse de la princesse). Ils permettent de se désinhiber et de se libérer.
  • Les arts plastiques : dessin, collage, peinture, poterie, fusain, estampes, calligraphie, modelage etc., il existe une multitude d’outils permettant de créer et de mettre en place un processus de création artistique à des fins thérapeutiques. C’est en observant la manière de structurer l’espace, de disposer les formes, d’utiliser les couleurs, d’associer les idées que le patient peut, avec son art-thérapeute, parvenir à donner un sens à sa création, prendre une distanciation objective puis une prise de conscience, et s’en inspirer pour effectuer les changements désirés dans sa vie.
  • Le conte : lu, mimé ou inventé, celui-ci permet d’exorciser les angoisses, le deuil, les peurs ou encore les frustrations.
  • Masques, maquillage et clown : ces techniques donnent une « voix » à toutes les figures de l’inconscient. Le masque favorise la levée des inhibitions et des défenses, le maquillage confronte avec ses fantasmes et le clown encourage à jouer avec ses vulnérabilités.

Comment se déroule une séance d’art thérapie ?

Le but du processus n’est pas artistique. On ne se préoccupe pas de la qualité ou de l’apparence de l’œuvre finale. La démarche thérapeutique consiste à laisser progressivement surgir ses images intérieures, qui peuvent être autant le reflet d’expériences du passé que de rêves auxquels on aspire. Le geste créateur fait appel au corps qui se met en mouvement pour créer une œuvre concrète. Dans le même élan, il sollicite l’imagination, l’intuition, la pensée et les émotions. Les images ou les formes ainsi créées, en plus de dévoiler certains aspects de soi, peuvent générer une vision et des comportements nouveaux qui contribueront à la guérison physique ou émotionnelle.

Pendant une séance, le patient réalise un travail d’introspection au calme au cours duquel il peut perdre la notion du temps. Une séance d’art thérapie se déroule individuellement ou en petit groupe, soit en institution médicale ou hospitalière, soit en atelier libéral, dans un endroit convivial et réconfortant, qui ressemble plus souvent à un atelier d’art qu’à un cabinet de thérapeute. Des prises en charge à domicile sont également possibles.

Avant d’entreprendre le travail de création, l’art-thérapeute cherche à définir les motifs et les objectifs thérapeutiques qui amènent le patient à suivre une thérapie afin de mieux le guider. Puis, il lui prodigue des conseils d’ordre technique relatifs aux techniques choisies et l’encourage à s’exprimer en représentant visuellement ce sur quoi il a décidé de s’investir. Parfois, le patient se lance directement dans une création, sans objectif préalable. Il se peut que quelques séances suffisent à cerner le problème. La thérapie peut aussi s’étendre sur un plus grand nombre de rencontres.

Le patient peut, par exemple, utiliser différents types de matériel pour créer des œuvres d’art qui représentent :

Une séance d’art-thérapie peut durer une à deux heures et s’organise autour de trois grands points en interaction permanente :

  • l’expression, qu’elle soit verbale ou non : apprendre à communiquer avec l’art-thérapeute en séance individuelle et avec les autres participants en ateliers de groupe autour d’une thématique artistique ou s’exprimer par la voie détournée de l’art ;
  • la création artistique : organiser et structurer sa pensée, pour créer une œuvre qui ait du sens ;
  • la réflexion sur sa création : mettre des mots sur son ressenti et ses émotions.

Les fins de séances donnent lieu à un échange verbal entre le praticien et son patient. Après avoir achevé sa production, ce dernier est ainsi invité à parler de ce qu’il a ressenti durant la création, de ce que celle-ci lui suggère. Il est aussi invité à s’appuyer sur la thérapie et l’expérience qu’il en tire pour amorcer un changement dans sa perception de lui-même et dans sa vie.

« D’un seul coup, le sens de leur production s’impose. C’est comme si une évidence longtemps secrète leur sautait aux yeux. » Dr Jean-Pierre Klein

L’art thérapie peut aussi se pratiquer dans un contexte de thérapie familiale. Cette démarche est alors organisée autour de tâches au cours desquelles les membres de la famille créent une œuvre ensemble. Cela peut s’accomplir verbalement ou non. L’unité familiale et l’art-thérapeute observent, explorent et interprètent le travail. Ce travail de groupe offre un espace pour améliorer la communication.

Existe-t-il des contre-indications à l’art thérapie ?

Il n’existe pas de contre-indications particulières à la pratique de l’art thérapie. Les contre-indications sont recherchées au cas par cas au travers d’un échange entre le patient, l’art-thérapeute et les autres professionnels de santé impliqués dans la prise en charge.  Cependant, l’art thérapie est à éviter en cas de dépression profonde ou de phase de grande excitation.

Cet article vous a intéressé ? Nous vous invitons à lire également l’article « Les bienfaits de la massothérapie face au cancer » : https://mesmomentsprecieux.fr/vivre-avec/les-bienfaits-de-la-massotherapie-face-au-cancer/

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